jeudi 5 mai 2016

Dix-neuvième arrondissement



DIX-NEUVIEME ARRONDISSEMENT



Bassin de la Villette  (angle Place de la Bataille de Stalingrad et Quai de la Seine, 19e)

Aboutissement du canal de l’Ourcq, le bassin de la Villette, creusé de 1806 à 1809, fut inauguré en grande cérémonie le 2 décembre 1808 pour fêter la première arrivée d’eau. Long de 800 mètres et large de 80, ce bassin fournit de l’eau en abondance aux Parisiens grâce à quatre galeries qui alimentent les fontaines de la capitale. Il servit aussi de patinoire durant les hivers rigoureux de 1810, 1816, 1820, 1827, et de cadre à des joutes nautiques l’été. A partir de 1838, un coche d’eau reliait Paris à Meaux deux fois par jour dans chaque sens. Toutes ces activités ont favorisé la multiplication des guinguettes le long de ses berges.


Belleville (139 Rue de Belleville, 19e)

Le premier habitat connu sur le territoire de Belleville est la ferme des Savies mentionnée dans un texte de 862. Trois siècles plus tard apparaît le hameau de Poitronville. Le nom de Belleville date de 1451, et la vie de ce village se développe autour d’une chapelle édifiée en 1543 à l’emplacement de l’église actuelle. De 1815 à 1859, cette communauté de 3 000 âmes se métamorphose en une cité de 70 000 habitants, la treizième ville de France, avant d’être annexée en 1860 à la capitale. Soucieux d’amoindrir le vote de sa population ouvrière frondeuse, Haussmann sépare la commune en deux, le long de sa rue principale, la rue de Belleville : le nord échoit au XIXe arrondissement, le sud au XXe.


Canal de l’Ourcq (angle Quai de l’Oise et Place Paul-Delouvrier, 19e)

Dès 1520, la prévôté des marchands de Paris avait pensé à rendre navigables les cours de l’Ourcq et de la Marne. Après les premiers travaux, entrepris entre 1632 et 1661, Riquet et Manse créent un canal entre Lizy-sur-Ourcq et Meaux, de 1676 à 1683. Jean-Pierre Brulée reprend le projet en 1787, et un décret de l’Assemblée nationale du 9 novembre 1790 prévoit l’ouverture d’un canal depuis le confluent de la Marne et de l’Ourcq jusqu’à la Villette. Mais il faut attendre l’arrêté consulaire du 19 mai 1802 pour le début de la réalisation des travaux aux frais de la ville de Paris. Inaugurée le 15 août 1813, la navigation sur le canal de l’Ourcq fait du port de la Villette l’entrepôt des marchandises affluant du nord et de l’est de la France.


Combat du Taureau (3 Avenue Mathurin-Moreau, 19e)

Dans le triangle défini par la rue de Meaux, la rue des Chaufourniers et l’avenue Mathurin-Moreau , fut installée en 1778 une arène dans laquelle étaient donnés des combats entre animaux sauvages et domestiques : chiens contre sangliers, loups, ours et surtout taureaux, d’où le nom de Combat du Taureau. Evoqué par Jules Janin dans « l’Ane mort », ce spectacle disparut entre 1845 et 1850. Il avait donné son nom à la barrière de l’enceinte des Fermiers généraux édifiée en 1786-1787 sur les plans de Ledoux pour contrôler l’entrée de Paris par la chaussée Saint-Louis (rue de la Grange-aux-Belles). C’est pourquoi cette barrière était dite indifféremment du Combat du Taureau, Saint-Louis ou de la Boyauderie.


Cimetière des Juifs portugais (46 Avenue de Flandre, 19e)

Sous l’Ancien Régime, les cimetières, réservés aux catholiques, étaient interdits aux protestants, juifs, comédiens et suicidés. La communauté des juifs d’origine portugaise avait passé un accord avec le patron de l’auberge à l’enseigne de l’Etoile, située à l’emplacement du 46 de l’avenue de Flandre, et enterrait dans son jardin les Israélites de toutes nationalités, morts à Paris. Le 3 mars 1780, Jacob Rodrigues Pereire, « agent de la nation juive portugaise à Paris », acheta deux jardins contigus à celui de l’auberge et obtint du roi l’autorisation d’en faire le cimetière des Juifs sephardim à condition de pratiquer les inhumations « nuitamment, sans scandale ni appareil ». Il fut abandonné en 1810, Napoléon ayant permis l’inhumation des juifs dans tous les cimetières.


Couvent Sainte-Périne (angle Rue de Flandre et Rue Riquet, 19e)

En 1646,  les chanoinesses augustines de Sainte-Périne ou Sainte-Pétronille quittent leur abbaye de Compiègne pour s’installer à La Villette, dans une maison achetée par le maréchal de Bassompierre, père d’une des religieuses. Située au 61-65 de l’avenue de Flandre, elle possède des jardins qui s’étendent presque jusqu’à la rue de Tanger. En proie à d’insurmontables problèmes financiers, la communauté abandonne La Villette en 1743, pour s’établir dans l’abbaye Sainte-Geneviève de Chaillot, rebaptisée Sainte-Périne. Les bâtiments sont affectés à une usine de rubans qui disparaît dès 1757, remplacée par une œuvre de charité supprimée à la Révolution : la Communauté de la Sainte-Famille du Sacré-Cœur de Jésus.


Entrepôts généraux (11 Quai de Gironde, 19e)

En 1836, l’entrepôt des farines et des céréales destinées aux Parisiens se limitait au grenier d’abondance de la Bastille et à la Halle aux blés. De nouvelles installations étaient indispensables à une population en rapide croissance. La Villette fut choisie à cause de ses canaux, qui permettaient un acheminement aisé et peu coûteux. Dès 1850, un deuxième magasin s’avéra nécessaire, et deux autres magasins-docks furent construits en 1858-1859 le long du quai de la Gironde, pour entreposer farines, fécules, grains, huiles, alcools et denrées coloniales. Incendiés en mai 1871, aux derniers jours de la Commune, tous ces bâtiments, rapidement reconstruits, ont servi durant un siècle, avant d’être supplantés par de nouvelles installations.


Fours-à-Chaux (111 Avenue Simon Bolivar, 19e)

C’est au XIIIe siècle que débute l’exploitation à ciel ouvert de la pierre à plâtre – le gypse – dans les environs du pressoir Saint-Martin et du gibet de Montfaucon. Elle se développe avec les progrès de la construction, et se transforme en carrières souterraines aux flancs des collines des Buttes-Chaumont et de Beauregard (carrières d’Amérique). Dans les excavations, ou à proximité immédiate, se multiplient les fours à plâtre. Les chaufourniers surveillent la cuisson du gypse, et tirent des fours des blocs de plâtre que les « batteurs de plâtre » brisent et réduisent en poussière à coups de bâton. Le passage des Fours-à-Chaux et la rue des Chaufourniers conservent le souvenir de ces activités, disparues en 1875 avec la fermeture des Carrières d’Amérique.


Gibet et voirie de Montfaucon (face au 53 Rue de Meaux, 19e)

Symbole de la justice royale, le gibet de Montfaucon se trouvait à l’origine sur une butte dont le centre correspondait à la place Robert-Desnos. Détruit en 1760, il fut aussitôt remplacé par un second gibet, 500 mètres plus loin vers le nord-est, à l’emplacement 46 de la rue de Meaux. Formé de quatre piliers en grès réunis en carré et entouré d’un fossé, ce gibet disparaît définitivement en 1792. Depuis 1772, il était flanqué par la voirie de Montfaucon, dépôt des ordures et vidanges de Paris, et clos d’équarrissage des chevaux. Autour de cette voirie s’élevaient des fabriques d’engrais à partir des déchets, des boyauderies pour la charcuterie, des élevages d’asticots pour la pêche. En 1845, la voirie fut transférée en forêt de Bondy, et le marché de la Villette (marché Secrétan) construit à sa place en 1868.

Il faut entendre ici le terme « voirie » dans le sens de lieu où l’on dépose les ordures, les épaves ramassées sur la voie publique… donc de décharge.


La Villette (134 Avenue de Flandre, 19e)

Dans une charte de 1198 apparaît le nom de la Ville Neuve Saint-Lazare, mentionnée en 1374 comme La Villette Saint-Lazare. Le siège du bailli de Saint-Lazare, principal seigneur de La Villette, se trouvait ici, près du carrefour actuel de l’avenue de Flandre et de la rue de Nantes, non loin de l’église paroissiale. Carrières à plâtre, blé, vignes, moulins à vent, constituaient la principale richesse de la communauté en 1789. Si elle comptait moins de 2 000 habitants en 1800, La Villette en dénombrait 30 000 lors de son annexion à Paris, le 1er janvier 1860. Son port l’a transformée en entrepôt de matières premières acheminées du nord et de l’est : charbon, fer, bois, sucre, blé, orge, destinées à être traitées dans ses forges, laminoirs, sucreries ou brasseries. 


Les carrières d’Amérique (30 Rue David d’Angers, 19e)

A la limite de Belleville et de la Villette, la butte de Beauregard a fait l’objet d’une exploitation intense de pierre à plâtre ou gypse dans les carrières d’Amérique. Ce nom, attesté dès 1682, n’a rien à voir avec une invraisemblable exportation de plâtre vers le Nouveau Monde. Avec la création en 1838 de la Société plâtrière de Paris, entreprise du banquier Jacques Laffitte, l’extraction prend une extension exceptionnelle. Presque épuisées, devenues un repaire de clochards et de rôdeurs, les carrières sont comblées en 1875 et remplacées par deux  éphémères marchés aux chevaux et aux fourrages, de part et d’autre de la place du Danube, tandis que la zone située entre les rues David-d’Angers et de la Solidarité devenait vers 1904 un ensemble de jardins ouvriers. 


Les Folies de Belleville (Angle rue de Belleville et Rue Jules Romains, 19e)

Sous la Restauration, la haute Courtille, c’est-à-dire le début de la rue de Belleville jusqu’à la rue Rébeval, remplace la basse Courtille de la rue du Faubourg-du-Temple dans la faveur des Parisiens. C’est ici que les bourgeois viennent s’encanailler en compagnie des chiffonniers et des voyous des barrières. UN dandy anglais, Charles de la Battut, « Mylord l’Arsouille », est le héros de ces fêtes dont l’apogée se situe à l’aube du mercredi des Cendres avec la descente de la Courtille de Belleville à la place du Château-d’Eau (de la République). La dernière eut lieu en 1838, mais la vogue des bals de Belleville se prolongea jusqu’à la guerre de 1870. Les bals les plus célèbres se tenaient chez Desnoyez au 8 et chez Favié au 13, aux Folies de Belleville.


Manufacture de pianos Erard (110 Avenue de Flandre, 19e)

En 1780, les frères Sébastien et Jean-Baptiste Erard, venus de Strasbourg, fondent une manufacture de pianos à Paris. Après un bref séjour dans l’hôtel de Villeroi (rue de Varenne), puis rue de Bourbon (rue de Lille), ils s’installent rue du Mail et deviennent la principale entreprise française de pianos, avec une trentaine d’ouvriers vers 1800. Ils en emploient 150 en 1827, plus de 300 en 1847, 315 en 1872 lorsqu’ils transfèrent leurs ateliers de fabrication au 110-112 de l’avenue de Flandre, dans des bâtiments spécialement construits à cet usage, à proximité des chantiers et réserves de bois de La Villette. Cette usine n’a fermé ses portes qu’au début de la guerre de 1939. La maison Erard a considérablement amélioré le piano et mis au point la harpe moderne. 

Marché aux bestiaux de la Villette (213 Avenue Jean Jaurès, 19e)

En 1855, le baron Haussmann décide le remplacement des marchés de Poissy, de Sceaux et de la rue Cochin (Halle aux veaux) par un unique marché aux bestiaux. Situé à l’est de l’intersection des canaux Saint-Denis et de l’Ourcq, son terrain couvre une cinquantaine d’hectares, au sud des abattoirs dont le sépare le canal de l’Ourcq, enjambé par un pont. Un chemin de fer à cinq voies se raccorde à la ligne de ceinture pour assurer le débarquement du bétail et l’embarquement des viandes. En 1862, la fontaine aux lions construite par Simon Richard en 1811 pour la place du Château-d’Eau (actuelle place de la République) prend place dans la cour d’entrée. Et quatre grandes halles métalliques conçues par Baltard sont inaugurées le 20 octobre 1867. 


Parc des Buttes-Chaumont (angle Rue Botzaris Avenue Simon Bolivar, 19e)

Désireux de donner aux Parisiens de vastes espaces verts, Napoléon III décide d’adjoindre aux bois de Boulogne (ouest) et de Vincennes (est), les parcs Montsouris (sud) et des Buttes Chaumont (nord). Les travaux commencent en novembre 1863 sous la direction de l’ingénieur Alphand et du jardinier Barillet-Deschamps, sur une zone de 27 hectares dévastée par les carrières d’extraction de gypse, tandis que l’architecte Davioud édifie maisons de gardiens et chalets-restaurants. L’inauguration du parc, le 1er avril 1867, coïncide avec cette de l’Exposition universelle. Plus que toute autre réalisation monumentale du Second Empire, les Buttes Chaumont incarnent l’âme baroque de cette époque si bien exprimée dans la musique d’Offenbach. 

Regard de la Lanterne (7 Rue Augustin Thierry, 19e)

C’est sans doute au XIIe siècle que les eaux de Belleville ont été captées à l’usage du prieuré de Saint-Martin-des-Champs. Un aqueduc de grandes dimensions (1,92 mètres de hauteur sur 1,18 de largeur) collectait les eaux de nombreuses sources et les acheminait vers Paris. La canalisation était entretenue grâce à des regards dont trois subsistent : ceux de la Lanterne, des Messiers (17, rue des Cascades), de la Roquette (36-38, rue de la Mare). La tête de l’aqueduc se situait au regard de la Lanterne, édifice important (4,70 mètres de diamètre et 8,80 de hauteur) à demi-enterré, construit entre 1583 et 1613. On y accède par un escalier de 20 marches à double rampe.


Rotonde de La Villette (Place de la Bataille de Stalingrad, 19e)

En 1785, pour empêcher la contrebande et mieux percevoir les droits d’entrée des marchandises dans Paris, les Fermiers généraux font édifier un mur entourant la capitale. Des pavillons sont prévus aux barrières pour les bureaux des commis de l’octroi. Pour avoir conçu et commencé de construire des bâtiments d’un coût excessif, Ledoux est déchargé de sa tâche dès septembre 1787. La rotonde de La Villette, dite aussi barrière Saint-Martin ou barrière de Senlis, transformée en caserne de gendarmerie sous la Restauration, a subsisté, sans les quatre guérites qui commandaient la Grande Rue de La Villette (avenue de Flandre) et la route de Meaux (avenue Jean-Jaurès) convergeant vers la rue du Faubourg Saint-Martin. 


Rue Monjol (angle Rue Burnouf et Rue Monjol, 19e)

Assainie en 1926, la rue Monjol était la dernière Cour des Miracles de Paris. En voici une description en 1883 : « Sur les hauteurs, à l’angle de la rue Monjol, qui indique la nouvelle largeur de cette dernière rue, une des plus misérables de l’ancienne banlieue. Cette maison appartient à M.Smith, qui tient un débit de vins et liqueurs rue des Chaufourniers, à deux pas de là. Cela fait, tout compté, un total de trois maisons pour la rue Fréry… Il y a là des tableaux inimaginables. La rencontre de la rue Monjol avec la rue Asselin forme un rond-point de quelques mètres, où des enfants en guenilles vont se chauffer au soleil, quand il y a un rayon de soleil. Tout autour, des masures indescriptibles. Un couloir d’un mètre de largeur conduit à la rue Bolivar. D’un côté de ce couloir, une palissade en bois, de l’autre un tertre en contre-haut sur lequel on voit deux ou trois indescriptibles cabanes, des cabanes habitées comme il n’en existe nulle part dans Paris, ni à la cité Doré, ni au passage Papier. Tour cela navre le cœur » (Extrait d’un article paru dans « La Ville de Paris », 4 avril 1883).


Salle de la Marseillaise (61 Avenue de Flandre, 19e)

A l’élection législative partielle de novembre 1869, les XVIIIe et XIXe arrondissements de Paris élisent député le plus fougueux des ennemis de Napoléon III, Henri Rochefort. Après la fermeture de la salle des Folies-Denoyez, rue de Belleville, lieu de réunion des adversaires de l’Empire, Rochefort loue les combles de la brasserie du 51 de la rue de Flandre. Il les baptise Salle de la Marseillaise, du nom du journal qu’il vient de créer. L’inauguration a lieu le 28 décembre 1869 dans une salle comble, en présence de 3 000 personnes. Mais Rochefort ne tarde pas à être condamné à six mois de prison pour ses écrits dans « la Marseillaise », et la police, venue l’arrêter à l’entrée de la salle, déclenche le 7 novembre 1870 une émeute qui fait 150 morts et blessés.

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