vendredi 6 mai 2016

Bornes défuntes




 BORNES DEFUNTES
Revue partielle


Si l'on en croit des sources non officielles (article du Parisien, page Wikipedia), il aurait existé 767 bornes "Histoire de Paris" réparties dans les rues de la capitale. Outre les 606 bornes toujours en place en mai 2016 (exception faire, peut-être, de celle sur "L'éclairage public au XIXe siècle"), j'ai pu, par divers recoupements (photos isolées trouvées sur internet notamment, consultation de "Google street view"), attester l'existence de 26 autres bornes, ayant un thème et un emplacement connus. Ces bornes défuntes sont les suivantes :


Base sectionnée de la borne "Le mariage de Verlaine"
 1er arrondissement :
- Mairie du 1er arrondissement (Place du Louvre)
- St Germain l’Auxerrois (Place du Louvre)
- Rue de la Grande Truanderie (Rue du même nom)
- Bibliothèque nationale (Rue de Richelieu)

 5e arrondissement :
- Institut du monde arabe (Rue des Fossés Saint-Bernard)
- Hôtel Le Brun (Rue du Cardinal Lemoine)
- Collège Coqueret (Impasse Chartière)
- Fondation Curie (Rue d'Ulm)
- Abbaye Saint-Victor (Rue Jussieu)

6e arrondissement :
- Musée Delacroix (Rue de Furstenberg)
- Musée Zadkine (Rue d'Assas)
- Brasserie des bords du Rhin (Bd. Saint-Germain)
- Théâtre de l’Odéon (Place de l'Odéon)

7e arrondissement  :
- Unesco (Place de Fontenoy)
- Hospice des incurables (ancien hôpital Laennec, rue de Sèvres)

9e arrondissement :
- Hôtel de Mercy Argentan (16 Bd Montmartre)

10e arrondissement :
- Théâtre du Gymnase (38 Bd de Bonne Nouvelle)

 13e arrondissement :
- Gare d’Austerlitz (Quai d'Austerlitz)
- Viaduc d’Austerlitz (Quai d'Austerlitz)
- Nécropole Saint-Marcel (Avenue des Gobelins, angle Bd. Arago)
- Poterne des Peupliers (Rue Max Jacob)
- L'Ecole Estienne (Boulevard Auguste Blanqui)

15e arrondissement :
- Citroën (Vers l'actuel Parc André Citroën)

18e arrondissement :
- La maison rose de Rosimond (Musée Montmartre, rue Corot)
- Naissance de la Compagnie de Jésus (Rue Yvonne le Tac)
- Le mariage de Verlaine (16 Rue Nicolet)

20e arrondissement :
- Ancienne gare de Ménilmontant

jeudi 5 mai 2016

Vingtième arrondissement



VINGTIEME ARRONDISSEMENT



Allée de Madame (angle Rue des Orteaux et Rue des Pyrénées, 20e)

Le tracé de la rue des Orteaux suit celui de « l’allée de Madame ». La duchesse d’Orléans, fille de Louis XIV et de Madame de Montespan, elle-même épouse du Régent, avait en effet fait planter, au milieu des vignobles de Charonne, une splendide allée bordée d’une double rangée d’arbres, pour se rendre plus confortablement de Paris à son château de Bagnolet. Celui-ci, qu’elle avait acquis en 1719, était entouré d’un vaste parc dont une partie se trouvait sur le territoire de l’actuel XXe arrondissement. La duchesse d’Orléans l’avais fait agrémenter de pavillons ou « folies », dont subsiste encore le curieux Pavillon de l’Ermitage (148, rue de Bagnolet).


Anciennes carrières à plâtre (15 Rue des Plâtrières, 20e)

Belleville fut longtemps réputée pour l’exploitation de la pierre à plâtre. Le plâtre est produit par la calcination et le broyage du gypse, dont le sous-sol de la colline est particulièrement riche. Elle fut très tôt exploitée, sans doute dès le haut Moyen Age, et l’extraction se fit d’abord à ciel ouvert. Le développement de l’urbanisme parisien au XVIIIe siècle provoque une recrudescence de l’activité souterraine des carriers, qui creusèrent de plus en plus, sans souci de sécurité publique. Un grave effondrement, survenu en 1778 rue de Ménilmontant, fit sept victimes et entraîna l’interdiction de toute exploitation souterraine dans les plâtrières de Belleville, Ménilmontant, Charonne et Bagnolet. La dernière carrière, celle du Père Rousset, située en bordure du boulevard Mortier, cessa ses activités vers 1880. 


Barrière de Belleville (4 Boulevard de Belleville, 20e)

Ici s’ouvrait la Barrière de Belleville, un des pavillons d’entrée dans le Mur des Fermiers généraux. Afin de mieux percevoir les impôts indirects sur les biens de consommation courante (alcool, tabac, denrées alimentaires, bois, etc.), la Ferme générale décida en 1783 d’édifier tout autour de la capital un mur haut de trois mètres, long de 24 km, percé seulement de 60 portes ou « barrières », destinées à percevoir les droits d’octroi. Ce procédé, imaginé pour combattre la fraude, provoqua un grave mécontentement des Parisiens : « le mur murant Paris rend Paris murmurant ». Sa construction fut confiée à l’architecte Claude-Nicolas Ledoux (1736-1806), qui réalisa une œuvre imposante dont seules subsistent aujourd’hui les rotondes de Monceau et de la Villette et les barrières de Denfert et de la Nation. Le succès des cabarets bellevillois était en partie dû à leur situation hors du mur : le vin, non soumis aux taxes, y était en effet moins cher qu’à Paris.


Boulevard Mortier (angle Boulevard Mortier et Avenue de la Porte de Bagnolet, 20e)

Le boulevard Mortier, comme l’ensemble des « boulevards des maréchaux » qui ceinturent Paris, est construit sur le tracé du chemin de ronde intérieur de l’enceinte fortifiée de Thiers. Afin d’écarter tout nouveau risque d’invasion, Louis-Philippe décida de transformer Paris en place forte. Construite de 1841 à 1844, la nouvelle enceinte fortifiée était constituée par un mur en pierre de taille et meulières, long de 30 kilomètres, percé de 52 entrées, protégé par un fossélarge de 15 mètres, et renforcé par 16 ouvrages avancés destinés à en défendre les abords. Elle était entourée d’une zone non aedificandi d’une largeur de 200 mètres environ. Démolie à partie de 1919, l’enceinte de Thiers fit place à des habitations à caractère social (les HBM), tandis que l’ancienne zone extérieure, longtemps refuge d’une population marginale, est maintenant occupée par le boulevard périphérique de Paris.


Cabaret du Pistolet (45 Rue des Couronnes, 20e)

Nous situons ici le Cabaret du Pistolet, où fut arrêté, le 20 octobre 1721, le célèbre bandit Cartouche. Louis-Dominique Bourguignon, dit Cartouche (1663-1721), défraya la chronique judiciaire sous la Régence. Après avoir terrorisé Paris et sa banlieue près de dix ans par ses vols et ses méfaits, commis en toute impunité apparente, il avait trouvé refuge dans ce cabaret louche, proche de la barrière de Belleville. Surpris dans sons sommeil par les sergents du Guet, jugé et condamné à mort, Cartouche fut roué vif en place de Grève, devant l’Hôtel de Ville, le 28 novembre 1721. Sa vie aventureuse inspira nombre de chansons, pièces et de théâtre et récits, qui connurent un grand succès populaire.  


Casque d’Or (Rue des Pyrénées, angle Rue de Bagnolet, 20e)

Le 9 janvier 1902, un fiacre, pris en chasse depuis l’hôpital Tenon par une bande de voyous, est attaqué ici, en plein après-midi. Après la fusillade, on releva plusieurs blessés. Ainsi commence l’affaire Casque d’Or. Immortalisée depuis par le film de Jacques Becker et la beauté de Simone Signoret, l’histoire d’Amélie Hélie, petite « Vénus de barrière » à l’opulente chevelure rousse, dont deux chefs de bandes « apaches », Leca et Manda, se disputaient les faveurs avec violence, fit déjà grand bruit à l’époque. Elle conféra une notoriété tapageuse à son héroïne : Casque d’Or connut les honneurs de la scène parisienne, où elle joua son propre rôle, avant d’écrire ses mémoires.


Catastrophe du 10  Août 1903 (62 Boulevard de Belleville, 20e)

Le métropolitain parisien, encore tout neuf, connut ici, entre les stations Couronnes et Ménilmontant, la première catastrophe de son histoire, le 10 août 1903. A l’époque, les wagons étaient en bois ; ce soir-là, un train prit feu après un court-circuit électrique. Les voyageurs, trompés par l’obscurité et la fumée, se bousculèrent pour gagner les sorties ; asphyxiés ou étouffés contre les murs où ils croyaient trouver une issue, il y eut 84 morts. Cette tragédie frappa très vivement l’opinion publique, tant en France qu’à l’étranger. Elle provoqua une réorganisation des normes de sécurité, avec l’installation d’un éclairage de secours indépendant de celui des souterrains et des stations, la création de postes d’incendie dans chaque station, et le remplacement des bancs d’attente par des banquettes fixes. 


Château de Ménilmontant (128 Rue Pelleport, 20e)

Le château de Ménilmontant et son parc, propriété de la famille Le Peletier de Saint-Fargeau de 1695 aux premières années du XIXe siècle, occupaient un vaste périmètre délimité par les rues de Romainville, Pelleport, du Surmelin, des Glaïeuls et des Fougères. Louis-Michel Le Peletier de Saint-Fargeau, né en 1760, député aux Etats généraux de 1789, membre de la Convention nationale, fut assassiné le 20janvier 1793 pour avoir voté la mort du roi sans appel ni sursis. Déclaré « martyr de la liberté », cet auteur d’un projet éducatif d’inspiration spartiate, destiné à forger l’homme nouveau, eût sans doute apprécié de voir sa fille adoptée par la Nation, en témoignage de la reconnaissance publique. En juillet 1793, Claude Chappe fit dans le parc les premières expérimentations de son système de télégraphie optique.


Cimetière de Belleville (260 Rue de Belleville, 20e)

A 128 mètres d’altitude, le cimetière de Belleville est le point culminant de l’Est parisien. Ouvert en 1804 sur des terrains provenant du domaine de la famille Le Peletier de Saint-Fargeau, ce fut d’abord le cimetière communal de l’ancien village de Belleville, rattaché à Paris en 1860. Parmi les sépultures les plus notables, citons celles de Léon Gaumont, de Monseigneur Maillet, fondateur de la chorale des Petits Chanteurs à la croix de bois, et d’une stèle commémorative à la mémoire des otages de la rue Haxo. A cause de sa situation géographique, il fut choisi par Claude Chappe pour y installer son télégraphe optique, expérimenté pour la première fois à cet endroit en 1792-1793. La première ligne installée reliait Paris à Lille, et la première dépêche officielle annonça, le 28 thermidor an II (15 août 1794), la reddition de la place forte du Quesnoy.


Cimetière du Père-Lachaise (Bd de Ménilmontant, entrée principale du cimetière, 20e)

Le cimetière du Père-Lachaise ou de l’Est est ouvert, depuis 1804, sur le domaine de Montlouis qui appartenait au XVIIe siècle aux Jésuites et auquel François de La Chaise, confesseur de Louis XIV, laissa son nom. A la suite de l’arrêté du 2 ventôse an IX (21 février 1801)qui interdit, pour des raisons de salubrité publique, l’existence de cimetières au cœur des villes, il fut décidé de créer, pour l’Est parisien, une grande nécropole sur la colline de Montlouis. Aménagé par l’architecte Brongniart comme un « cimetière modèle » et inauguré en 1804, il suscite rapidement un grand engouement mondain. Nombreux furent les Parisiens, illustres ou tout simplement fortunés, qui y rivalisèrent de faste et on peut à juste titre voir dans le cimetière du Père-Lachaise un musée de l’art funéraire. Le cimetière fut le théâtre de sanglants combats en mai 1871 ; le Mur des Fédérés perpétue le souvenir des derniers combattants de la Commune de Paris qui y trouvèrent la mort, dans les dernières heures de la Semaine Sanglante. 


Eglise Notre-Dame de la Croix (2 bis Rue Julien Lacroix, 20e)

L’église Notre-Dame de la Croix fut construite de 1863 à 1872, pour remplacer une modeste chapelle en bois édifiée en 1823, 6, rue de la Mare, et faire face à l’augmentation de la population du hameau de Ménilmontant. Comme beaucoup d’églises parisiennes (Saint-Eustache, Saint-Germain L’Auxerrois, Saint-Séverin, Saint-Sulpice, Saint-Ambroise, etc.), elle abrita, pendant la Commune de Paris, un club révolutionnaire. C’est là qu’on vota, le 6 mai 1871, la condamnation de l’archevêque de Paris, Monseigneur Darboy, et des autres otages fusillés avec lui à la prison de la Roquette, le 24 mai 1871.


Eglise Saint-Germain de Charonne (face au 118 Rue de Bagnolet, 20e)

Selon la légende, vers 430, saint Germain, alors évêque d’Auxerre, aurait rencontré sur les coteaux de Charonne une jeune fille de Nanterre, la future patronne de Paris sainte Geneviève. En souvenir, les habitants du lieu auraient édifié un petit oratoire ; sur son emplacement s’élève l’actuelle église Saint-Germain de Charonne, qui allie harmonieusement quelques vestiges du XIIe siècle (gros pilier de la tour) à une architecture élégante, des XVe et XVIIIe siècles pour l’essentiel. Avant 1860, date de son rattachement à Paris, elle fut l’église paroissiale de l’ancien village de Charonne dont elle constituait le cœur, avec la rue Saint-Blaise. Aujourd’hui, elle reste bordée de son ancien cimetière, qui abrite, entre autres, la sépulture de Bègue Magloire, « peintre en bâtiments, patriote, poète, philosophe et secrétaire e Monsieur de Robespierre ».


Hôpital Tenon (4 Rue de la Chine, 20e)

L’hôpital Tenon fut d’abord l’ancien hôpital de Ménilmontant. Inauguré le 20 novembre 1878, il reçut son nom actuel en 1879, en hommage au médecin et chirurgien français, Jacques Tenon (1724-1816), particulièrement intéressé à la réforme de l’organisation hospitalière de Paris sous l’Ancien Régime. Parmi les malades, anonymes et illustres, le poète Paul Verlaine (1844-1896) y fut hospitalisé à plusieurs reprises, dans les dernières années de sa vie. 


La Bellevilloise (21 Rue Boyer, 20e)

« La Bellevilloise », société coopérative de consommation fondée ici en 1877 par des ouvriers mécaniciens, avait pour devise « Achat direct au producteur, vente directe au consommateur ». Outre la vente à prix modéré de produits de consommation courante (alimentation générale, viande, charbon, quincaillerie, nouveautés) grâce à un réseau serré de centres de distribution établis dans les différents quartiers, elle proposait aux coopérateurs des activités sociales : un café, un patronage laïque pour les enfants, une bibliothèque, une fanfare (« La Symphonie de la Bellevilloise »), une caisse de solidarité. Elle connut un succès rapide, regroupant jusqu’à 9 000 sociétaires en 1912. Inspirée par les principes du coopératisme proudhonien, elle ouvrit en 1910, rue Boyer, une « Maison du Peuple » qui accueillit dès cet instant les rassemblements ouvriers.


La Campagne à Paris (1 Rue Géo Chavez, 20e)

Délimitée par les rues du Capitaine Ferber, Léo Chavez et le boulevard Mortier, « la Campagne à Paris » est un charmant ensemble pavillonnaire, créé pour faire face à la crise du logement des années 1920. En 1906, à l’initiative de quelques particuliers qui mirent à profit les récentes lois sur les habitations à bon marché, se constitua une société coopérative de construction. Après bien des vicissitudes dues à la Première Guerre mondiale et aux difficultés économiques, « la Campagne à Paris » était inaugurée le 20 juin 1926. elle est édifiée sur l’emplacement de l’une des dernières carrières de plâtre du XXe arrondissement, la « carrière du Père Rousset », qui cessa ses activités vers 1880 et fur ensuite transformée en décharge.


Lac de Saint-Fargeau (298 Rue de Belleville, 20e)

A cet emplacement se trouvait, au XIXe siècle, le cabaret du Lac Saint-Fargeau, ouvert en 1859 sur une ancienne carrière de sable que son ingénieux propriétaire avait eu l’idée de remplir d’eau et d’agrémenter d’une île artificielle. Il connut jusqu’à la Première Guerre mondiale un grand succès : on y dégustait le vin suret de Belleville, on y dansait, on y canotait, on y pêchait même. Pour mieux attirer la clientèle parisienne, la patron du Lac Saint-Fargeau obtint de la Compagnie des Omnibus que la ligne de Belleville à Paris eût son terminus devant son établissement ; c’était la ligne « Arts-et-Métiers  - Lac Saint-Fargeau », préfiguration de l’actuelle ligne 11 du métro.


La Courtille (6 Rue de Belleville, 20e)

La culture, fort ancienne, de la vigne sur les hauteurs de Belleville produisait un petit vin, dit « guinguet », que les Parisiens se plaisaient à venir déguster : de nombreux cabarets prospéraient aux abords des postes d’octroi. Déjà la mode sous l’Ancien Régime, la Courtille connut une nouvelle heure de gloire au XIXe siècle, avec des guinguettes aux noms pittoresques et évocateurs : le Salon de Flore, le Petit Chaume, la Puce qui saute, le Bal Sauvage, etc. L’attraction principale en était, à l’aube du Mercredi des Cendres, la « Descente de la Courtille » : après une nuit de festivités et de ripailles à Belleville, le flot tumultueux des fêtards, masqués pour la plupart, rentrait dans Paris. Vers 1830, un des héros de cette fête fut le célèbre Mylord l’Arsouille, qui amusait l’opinion de ses excentricités.


La Goutte de Lait de Belleville (126 Boulevard de Belleville, 20e)

Ici a été créé en 1894 un dispensaire appelé « la goutte de lait de Belleville », par le docteur Gaston Variot (Demigny, Saône-et-Loire, 1885- Paris, 1930), l’un des pionniers de la puériculture, collaborateur de Louis Pasteur. Médecin des hôpitaux en 1889, il se spécialise dans les soins infantiles, fonde l’école de puériculture des Enfants Assistés et publie un traité d’hygiène infantile. Grâce à des généreux donateurs et à une subvention de la Ville de Paris, il fait transformer un ancien gymnase par l’architecte Claveau pour y installer ce dispensaire, et y distribue les premiers biberons de lait pasteurisé afin de diffuser ce nouveau procédé. Son but est de créer des centres maternels proposant des consultations et des dons de lait stérile, afin de protéger la santé des jeunes enfants. Ce bâtiment abrite aujourd’hui le Centre Elisabeth, une autre association sociale qui officie dans le domaine de l’information et de l’accueil familial.


La Taverne Desnoyez (10 Rue de Belleville, 20e)

Le Bal Desnoyez pouvait accueillir ici jusqu’à 2000 personnes, et connut au XIXe siècle « une gloire universelle ». A son propos, ne chantait-on pas : « Ce n’est que chez Desnoyez Nos amis à la Courtille Ce n’est que chez Desnoyez Que l’on peut bien danser ». Bals et cabarets furent aussi des salles de réunions politiques, très populaires à la fin du XIXe siècle. Ainsi, Gambetta y exposa en 1869 son fameux « Programme de Belleville ». L’atmosphère de ces rencontres était souvent surchauffée, orateurs et public s’empoignait à l’envi, sans hésiter, le cas échéant, à faire le coup de poing. Les salles les plus célèbres furent la salle Favier (13, rue de Belleville) et la salle Graffart (128, boulevard de Ménilmontant).


Les Saint-Simoniens (145 Rue de Ménilmontant, 20e)

Ici se trouvait la propriété occupée en 1832 par un groupe d’adeptes du saint-simonisme regroupés sous l’autorité de Prosper Enfantin, dit le Père Enfantin (1796-1864). Le comte de Saint-Simon (1760-1825) fut l’un des précurseurs de la philosophie positiviste et de la science sociale ; il prônait l’avènement d’une société industrielle, gérée par les producteurs, où s’harmonisaient spontanément les intérêts des chefs d’entreprise et des ouvriers. A Ménilmontant, les saint-simoniens, habillés d’un pantalon blanc, d’un gilet rouge et d’une tunique violette, vivaient une vie communautaire et fraternelle, et se livraient aux travaux manuels en chantant des cantiques. Le dimanche, ils recevaient la visite de nombreux curieux amusés par leurs extravagances. La communauté se sépara rapidement pour des raisons financières, et la maison fut mise en vente en 1835.


Les Sources de Belleville (angle Rue des Cascades et Rue Levert, 20e)

Le nom de rue des Cascades, comme celui de la rue des Rigoles, des Savies et de la Mare, évoque les sources autrefois nombreuses sur le territoire de Belleville. Les abbayes parisiennes qui y possédaient des terres (prieuré de Saint-Lazare, abbaye de Saint-Martin des Champs, Commanderie du Temple, etc.), organisèrent très tôt un réseau compliqué d’aqueducs afin de capter ces eaux à leur usage. A cette époque, l’approvisionnement de Paris était essentiellement assuré par la Seine et par quelques puits privés, souvent peu salubres. Les « regards », petits bâtiments destinés à protéger les sources, sont les derniers vestiges conservés de ces travaux ; subsistent encore aujourd’hui le regard des Messiers (17, rue des Cascades), celui de Saint-Martin (au 40-42 de la même rue) et le regard de la Roquette (36, rue de la Mare).


Le télégraphe Chappe (40 Rue du télégraphe, 20e)

Claude Chappe choisit ce point culminant de la région Est de Paris (128 mètres d’altitude) pour installer son télégraphe optique. Une première tentative échoua en septembre 1792 : croyant qu’il voulait communiquer avec Louis XVI, alors enfermé au Temple, les Bellevillois incendièrent ses installations. Les premières expérimentations eurent lieu en juillet 1793, en présence des conventionnels Lakanal et Arbogast ; elles permirent de transmettre un message de Belleville à Saint-Martin du Tertre, près de Pontoise, en 11 minutes. Dès le mois d’août 1794, la liaison fut établie entre Paris et Lille : les dépêches parcouraient désormais cette distance en 3 heures alors que 3 jours étaient auparavant nécessaires.


Ligue de la Régénération Humaine (27 Rue de la Duée, 20e)

De 1902 à 1908, cet immeuble fut le siège de la Ligue de la Régénération humaine, première organisation néo-malthusienne française. Fondée en 1896 par Paul Robin (1837-1912), membre de la première Association internationale des Travailleurs et pionnier en France de l’éducation intégrale, la Ligue de la Régénération humaine se donna pour mission de convaincre les classes populaires qu’elles avaient tout intérêt, pour leur survie économique et pour lutter contre l’oppression sociale dont elles étaient l’objet, à limiter volontairement le nombre de leurs enfants. Elle travaillait, notamment par des conférences publiques et des brochures, à populariser les méthodes contraceptives. Dissoute en 1908, la Ligue de la Régénération humaine fit place au groupe de « Génération consciente » d’Eugène Humbert ; celui-ci continua son action jusqu’à la promulgation de la loi de 1920, qui interdit toute propagande anticonceptionnelle.


L’Ile d’Amour (10 Rue du Jourdain, 20e)

L’ancienne mairie de Belleville fut aussi la première mairie du XXe arrondissement après l’annexion de cette commune à Paris en 1860. Elle avait été installée en 1847 dans une ancienne guinguette appelée « L’Ile d’Amour », qui tirait son enseigne fort suggestive du nom de son propriétaire : un certain M. Damours ! Avec ses charmilles, ses bosquets et son décor de cabaret, le lieu invitait plus au divertissement qu’il n’évoquait la pompe municipale. Qu’on en juge : « Un escalier d’orchestre ou de soupente ; à la justice de paix de prétendues colonnes grecques comme dans les bals publics d’autrefois ; de-ci de-là dans les angles des nœuds d’amour gravés dans la muraille, que le badigeon n’a pas suffisamment dissimulés, des cœurs enflammés que perce une flèche symbolique… »


Mairie du vingtième arrondissement (44 Avenue Gambetta, 20e)

Construite entre 1867 et 1877 par l’architecte Claude-Augustin Salleron, la Mairie du XXe arrondissement est un édifice de style Renaissance , imposant mais élégant, surmonté d’un campanile. Elle renferme, dans la Salle des Mariages, d’intéressantes fresques du peintre Léon Glaize (1842-1932), qui illustrent les thèmes suivants fort à l’honneur à la fin du XIXe siècle : « Le triomphe de la République » (1891), « Les Grands Hommes de la Révolution devant le Tribunal de la Postérité » (1880), « Le Mariage ». Plus récente, une sculpture en haut relief signée Paul Belmondo, « Le Baiser », orne l’escalier d’honneur. 


Maison de Nicolas Carré De Baudoin (121 Rue de Ménilmontant, 20e)

Cet élégant pavillon, construit en 1770 pour Nicolas Carré de Baudoin, dans un style monumental, évoque les célèbres villas de l’architecte italien Palladio (1508-1580). C’est un témoin superbe (et aujourd’hui unique) des maisons de campagne ou « folies » édifiées au XVIIIe siècle pour le repos des aristocrates et bourgeois enrichis. Il abrita, au XIXe siècle, un pensionnat de jeunes filles, puis un orphelinat destiné aux enfants des victimes du choléra. 


Patronage Saint-Pierre (15 Rue du Retrait, 20e)

Le patronage Saint-Pierre a été créé en 1877 par des membres des conférences Saint-Vincent-de-Paul et était d’abord installé au 29, rue du Retrait. En 1834, il est pris en charge par les pères Salésiens (qui se réfèrent à saint François de Sales), ordre fondé par Don Bosco. Un théâtre est installé qui donne sa première représentation en 1886. Le patronage achète son terrain actuel en 1922 et les travaux de construction commencent en 1927. L’église Saint-Jean-Bosco a été réalisée par l’architecte Rotter de 1933 à 1937. La vie du patronage pendant la première moitié du XXe siècle est marquée par l’action du père Dhuit, resté plus de quarante ans en fonction. Le théâtre présente chaque année depuis 1932 la pièce « La passion à Ménilmontant ».


Pavillon de l’Ermitage (148 Rue de Bagnolet, 20e)

Edifié par l’architecte Serin vers 1735, le Pavillon de l’Ermitage est aujourd’hui le seul vestige de l’immense parc du château de Bagnolet, dont une partie se trouvait sur le territoire de l’actuel XXe arrondissement en bordure de la rue de Bagnolet. En 1719, la duchesse d’Orléans, épouse du Régent et fille de Louis XIV et de Madame de Montespan, acquiert le château et fait agrémenter le parc de pavillons de repos appelés « folies ». Sous la Révolution, ce Pavillon appartient au baron de Batz compromis, en 1793, dans une infructueuse tentative d’évasion du roi. Le Pavillon de l’Ermitage ne doit pas ce nom à sa situation isolée, mais à son décor intérieur de peintures murales, qui représentent des ermites en méditation.


Place des Grès (44 Rue Saint-Blaise, 20e)

La place des Grès constitue, avec la rue Saint-Blaise et l’église Saint-Germain, le cœur historique de l’ancien village de Charonne, rattaché à Paris en 1860 pour former, avec la commune de Belleville, le XXe arrondissement. Sous l’Ancien Régime, ici se trouvaient le poteau de justice et le carcan d’infamie des seigneurs de Charonne, où les coupables de vols, tromperies et autres délits mineurs étaient exposés aux moqueries et aux quolibets de la foule. En revanche, les fourches patibulaires,le gibet où l’on pendait les grands criminels, se dressaient plus au nord, rue de la Justice. Plus récemment, la place des grès fut transformée en dépôt de pavés, d’où son nom. 


Rue des Vignoles (angle Rue des Vignoles et Rue des Orteaux, 20e)

Ce joli nom évoque la culture de la vigne, autrefois une des activités principale des habitants de l’actuel XXe arrondissement et, tout particulièrement, du coteau de Charonne prédisposé à la viticulture par son exposition et la composition de son sol. Les grandes abbayes parisiennes y possédèrent très tôt vignes et pressoirs, qui leur procuraient le vin nécessaire à la célébration de la messe. Plus tard, ces coteaux produisirent un vin aigrelet, appelé « guinguet » (d’où la désignation des lieux où on le buvait comme « guinguettes »), fort prisé des Parisiens qui venaient le déguster entre amis, le dimanche, dans les cabarets de la Courtille, de Ménilmontant et de Charonne.


Rue Saint-Blaise (2 Rue Saint-Blaise, 20e)

Anciennement dénommée « grande rue Saint-Germain », la rue Saint-Blaise «était la rue principale de l’ancien village de Charonne,  rattachée à Paris en 1860. Bourgeois et aristocrates de la capitale y mettaient volontiers leurs enfants en nourrice et s’y faisaient construite des demeures de plaisance. Si ces dernières n’ont pas résisté à l’urbanisme moderne, la rue Saint-Blaise a conservé son aspect d’antan. Au n°2, se trouvait un élégant hôtel construit entre cour et jardin par l’architecte Jacques-François Blondel (1706-1774), l’un des créateurs du style Louis XVI. Le Camus de Mézières, architecte de l’hôtel de Beauvau (actuel ministère de l’Intérieur) et de la Halle aux blés de Paris, possédait une belle maison champêtre au n°5. Enfin, au n°26, débouchait l’impasse des Deux-Portes où, vers 1780, Fouquier-Tinville louait, dit-on, une maison de campagne.


Taverne du Bagne de Maxime Lisbonne (12 Rue de Belleville, 20e)

La Taverne du Bagne et des Ratapoils fut ouverte ici, en 1884, par un ancien membre de la Commune de Paris, Maxime Lisbonne, à son retour de déportation en Nouvelle-Calédonie. « Elle avait, écrit un contemporain, la prétention de représenter exactement une des casernes de Nouméa. On eût dit d’une prison. Au-dessus de la porte, une lanterne rouge. Sur la toiture, à droite et à gauche, deux canons ». On ne sortait de l’étrange établissement qui était resté « la gloire de Lisbonne » qu’à l’aide de ce carton vert ou jaune :

CERTIFICAT DE LBERATION
Le Condamné a consommé et s’est bien
Conduit
Le Directeur M. Lisbonne

« A l’intérieur, qui était d’un minable à faire fuir, mais dans lequel on s’empilait, le service était confié à des forçats, ayant tous au pied une chaîne se terminant par un boulet. Seulement  le boulet était creux, s’accrochait à la ceinture, s’ouvrait et contenait une serviette avec laquelle on essuyait les tables. Là, le bock s’appelait un boulet ».


Théâtre de Belleville (48 Rue de Belleville, 20e)

Le Théâtre de Belleville fut l’un des hauts lieux de la culture bellevilloise jusqu’à la dernière guerre. Au début du XIXe siècle, pour les récompenser d’avoir révélé le lieu où avaient été ensevelies les dépouilles de Louis XVI et de Marie-Antoinette après leur exécution, les frères Seveste se virent octroyer par Louis XVIII le privilège d’exploiter les théâtres de la banlieue de Paris. Le Théâtre de Belleville ouvrit donc ses portes le 25 octobre 1828, et présenta au public nombre de comédies et de drames à succès. De grands acteurs, comme Mélingue, Lacressonnière, Brasseur, y firent leurs premières armes. Accidentellement détruit par un incendie en décembre 1867, il fut reconstruit à l’identique, et rouvrit en septembre 1868. En 1932 le théâtre fut rasé puis reconstruit au rez-de-chaussée de l’immeuble de huit étages situé au fond de la Cour Lesage. Le rideau de scène y retomba définitivement en 1939.


Villa des otages (85 Rue Haxo, 20e)

Ancien bal public connu sous le nom de Cité de Vincennes, la « Villa des Otages » fut le théâtre d’un épisode tragique de la Semaine sanglante de la Commune de Paris (21-28 mai 1871). Le 26 mai 1871, 50 otages tirés de la prison de la Roquette, pour la plupart des prêtres, des Gardes de Paris et des gendarmes, y furent conduits et abattus par la foule sans autre forme de procès. Parmi eux figurait l’abbé Planchat, fondateur du patronage de Charonne, dont une rue du XXe arrondissement porte aujourd’hui le nom. Eugène Varlin et les membres du Comité central essayèrent en vain de s’opposer à ce massacre. Mais rien ne put arrêter la foule, désespérée par les exactions et les exécutions sommaires des Versaillais, qui reprenaient alors Paris rue par rue, maison par maison. « Un feu de peloton, quelques coups isolés d’abord, puis une décharge longue, longue qui n’en finit plus… » (Jules Vallès, L’Insurgé 1885). 


Villa Faucheur (5 Rue des Envierges, 20e)

Villa Faucheur, où il demeurait alors, Emile Henry, jeune anarchiste adepte de la « propagande par le fait », fabriqua sa bombe, jetée le 1é février 1894 dans le café Le Terminus de la gare Saint-Lazare, faisant une vingtaine de blessés. Il fut exécuté le 21 mai suivant. Son geste s’inscrit dans une longue suite d’attentats anarchistes, inaugurée en 1892 par Ravachol qui avait fait sauter plusieurs immeubles, et particulièrement illustrée par Auguste Vaillant qui lança, sans faire de victimes, le 9 décembre 1893, une bombe dans la Chambre des députés. Cette série d’attentats - le fait d’une minorité d’exaltés, souvent influencés par les nihilistes russes – frappa fortement l’opinion publique. Après l’assassinat du Président Sadi Carnot par Caserio, en juin 1894, les principaux anarchistes français furent poursuivis dans le Procès des Trente, dont le verdict de clémence calma les esprits. 

Dix-neuvième arrondissement



DIX-NEUVIEME ARRONDISSEMENT



Bassin de la Villette  (angle Place de la Bataille de Stalingrad et Quai de la Seine, 19e)

Aboutissement du canal de l’Ourcq, le bassin de la Villette, creusé de 1806 à 1809, fut inauguré en grande cérémonie le 2 décembre 1808 pour fêter la première arrivée d’eau. Long de 800 mètres et large de 80, ce bassin fournit de l’eau en abondance aux Parisiens grâce à quatre galeries qui alimentent les fontaines de la capitale. Il servit aussi de patinoire durant les hivers rigoureux de 1810, 1816, 1820, 1827, et de cadre à des joutes nautiques l’été. A partir de 1838, un coche d’eau reliait Paris à Meaux deux fois par jour dans chaque sens. Toutes ces activités ont favorisé la multiplication des guinguettes le long de ses berges.


Belleville (139 Rue de Belleville, 19e)

Le premier habitat connu sur le territoire de Belleville est la ferme des Savies mentionnée dans un texte de 862. Trois siècles plus tard apparaît le hameau de Poitronville. Le nom de Belleville date de 1451, et la vie de ce village se développe autour d’une chapelle édifiée en 1543 à l’emplacement de l’église actuelle. De 1815 à 1859, cette communauté de 3 000 âmes se métamorphose en une cité de 70 000 habitants, la treizième ville de France, avant d’être annexée en 1860 à la capitale. Soucieux d’amoindrir le vote de sa population ouvrière frondeuse, Haussmann sépare la commune en deux, le long de sa rue principale, la rue de Belleville : le nord échoit au XIXe arrondissement, le sud au XXe.


Canal de l’Ourcq (angle Quai de l’Oise et Place Paul-Delouvrier, 19e)

Dès 1520, la prévôté des marchands de Paris avait pensé à rendre navigables les cours de l’Ourcq et de la Marne. Après les premiers travaux, entrepris entre 1632 et 1661, Riquet et Manse créent un canal entre Lizy-sur-Ourcq et Meaux, de 1676 à 1683. Jean-Pierre Brulée reprend le projet en 1787, et un décret de l’Assemblée nationale du 9 novembre 1790 prévoit l’ouverture d’un canal depuis le confluent de la Marne et de l’Ourcq jusqu’à la Villette. Mais il faut attendre l’arrêté consulaire du 19 mai 1802 pour le début de la réalisation des travaux aux frais de la ville de Paris. Inaugurée le 15 août 1813, la navigation sur le canal de l’Ourcq fait du port de la Villette l’entrepôt des marchandises affluant du nord et de l’est de la France.


Combat du Taureau (3 Avenue Mathurin-Moreau, 19e)

Dans le triangle défini par la rue de Meaux, la rue des Chaufourniers et l’avenue Mathurin-Moreau , fut installée en 1778 une arène dans laquelle étaient donnés des combats entre animaux sauvages et domestiques : chiens contre sangliers, loups, ours et surtout taureaux, d’où le nom de Combat du Taureau. Evoqué par Jules Janin dans « l’Ane mort », ce spectacle disparut entre 1845 et 1850. Il avait donné son nom à la barrière de l’enceinte des Fermiers généraux édifiée en 1786-1787 sur les plans de Ledoux pour contrôler l’entrée de Paris par la chaussée Saint-Louis (rue de la Grange-aux-Belles). C’est pourquoi cette barrière était dite indifféremment du Combat du Taureau, Saint-Louis ou de la Boyauderie.


Cimetière des Juifs portugais (46 Avenue de Flandre, 19e)

Sous l’Ancien Régime, les cimetières, réservés aux catholiques, étaient interdits aux protestants, juifs, comédiens et suicidés. La communauté des juifs d’origine portugaise avait passé un accord avec le patron de l’auberge à l’enseigne de l’Etoile, située à l’emplacement du 46 de l’avenue de Flandre, et enterrait dans son jardin les Israélites de toutes nationalités, morts à Paris. Le 3 mars 1780, Jacob Rodrigues Pereire, « agent de la nation juive portugaise à Paris », acheta deux jardins contigus à celui de l’auberge et obtint du roi l’autorisation d’en faire le cimetière des Juifs sephardim à condition de pratiquer les inhumations « nuitamment, sans scandale ni appareil ». Il fut abandonné en 1810, Napoléon ayant permis l’inhumation des juifs dans tous les cimetières.


Couvent Sainte-Périne (angle Rue de Flandre et Rue Riquet, 19e)

En 1646,  les chanoinesses augustines de Sainte-Périne ou Sainte-Pétronille quittent leur abbaye de Compiègne pour s’installer à La Villette, dans une maison achetée par le maréchal de Bassompierre, père d’une des religieuses. Située au 61-65 de l’avenue de Flandre, elle possède des jardins qui s’étendent presque jusqu’à la rue de Tanger. En proie à d’insurmontables problèmes financiers, la communauté abandonne La Villette en 1743, pour s’établir dans l’abbaye Sainte-Geneviève de Chaillot, rebaptisée Sainte-Périne. Les bâtiments sont affectés à une usine de rubans qui disparaît dès 1757, remplacée par une œuvre de charité supprimée à la Révolution : la Communauté de la Sainte-Famille du Sacré-Cœur de Jésus.


Entrepôts généraux (11 Quai de Gironde, 19e)

En 1836, l’entrepôt des farines et des céréales destinées aux Parisiens se limitait au grenier d’abondance de la Bastille et à la Halle aux blés. De nouvelles installations étaient indispensables à une population en rapide croissance. La Villette fut choisie à cause de ses canaux, qui permettaient un acheminement aisé et peu coûteux. Dès 1850, un deuxième magasin s’avéra nécessaire, et deux autres magasins-docks furent construits en 1858-1859 le long du quai de la Gironde, pour entreposer farines, fécules, grains, huiles, alcools et denrées coloniales. Incendiés en mai 1871, aux derniers jours de la Commune, tous ces bâtiments, rapidement reconstruits, ont servi durant un siècle, avant d’être supplantés par de nouvelles installations.


Fours-à-Chaux (111 Avenue Simon Bolivar, 19e)

C’est au XIIIe siècle que débute l’exploitation à ciel ouvert de la pierre à plâtre – le gypse – dans les environs du pressoir Saint-Martin et du gibet de Montfaucon. Elle se développe avec les progrès de la construction, et se transforme en carrières souterraines aux flancs des collines des Buttes-Chaumont et de Beauregard (carrières d’Amérique). Dans les excavations, ou à proximité immédiate, se multiplient les fours à plâtre. Les chaufourniers surveillent la cuisson du gypse, et tirent des fours des blocs de plâtre que les « batteurs de plâtre » brisent et réduisent en poussière à coups de bâton. Le passage des Fours-à-Chaux et la rue des Chaufourniers conservent le souvenir de ces activités, disparues en 1875 avec la fermeture des Carrières d’Amérique.


Gibet et voirie de Montfaucon (face au 53 Rue de Meaux, 19e)

Symbole de la justice royale, le gibet de Montfaucon se trouvait à l’origine sur une butte dont le centre correspondait à la place Robert-Desnos. Détruit en 1760, il fut aussitôt remplacé par un second gibet, 500 mètres plus loin vers le nord-est, à l’emplacement 46 de la rue de Meaux. Formé de quatre piliers en grès réunis en carré et entouré d’un fossé, ce gibet disparaît définitivement en 1792. Depuis 1772, il était flanqué par la voirie de Montfaucon, dépôt des ordures et vidanges de Paris, et clos d’équarrissage des chevaux. Autour de cette voirie s’élevaient des fabriques d’engrais à partir des déchets, des boyauderies pour la charcuterie, des élevages d’asticots pour la pêche. En 1845, la voirie fut transférée en forêt de Bondy, et le marché de la Villette (marché Secrétan) construit à sa place en 1868.

Il faut entendre ici le terme « voirie » dans le sens de lieu où l’on dépose les ordures, les épaves ramassées sur la voie publique… donc de décharge.


La Villette (134 Avenue de Flandre, 19e)

Dans une charte de 1198 apparaît le nom de la Ville Neuve Saint-Lazare, mentionnée en 1374 comme La Villette Saint-Lazare. Le siège du bailli de Saint-Lazare, principal seigneur de La Villette, se trouvait ici, près du carrefour actuel de l’avenue de Flandre et de la rue de Nantes, non loin de l’église paroissiale. Carrières à plâtre, blé, vignes, moulins à vent, constituaient la principale richesse de la communauté en 1789. Si elle comptait moins de 2 000 habitants en 1800, La Villette en dénombrait 30 000 lors de son annexion à Paris, le 1er janvier 1860. Son port l’a transformée en entrepôt de matières premières acheminées du nord et de l’est : charbon, fer, bois, sucre, blé, orge, destinées à être traitées dans ses forges, laminoirs, sucreries ou brasseries. 


Les carrières d’Amérique (30 Rue David d’Angers, 19e)

A la limite de Belleville et de la Villette, la butte de Beauregard a fait l’objet d’une exploitation intense de pierre à plâtre ou gypse dans les carrières d’Amérique. Ce nom, attesté dès 1682, n’a rien à voir avec une invraisemblable exportation de plâtre vers le Nouveau Monde. Avec la création en 1838 de la Société plâtrière de Paris, entreprise du banquier Jacques Laffitte, l’extraction prend une extension exceptionnelle. Presque épuisées, devenues un repaire de clochards et de rôdeurs, les carrières sont comblées en 1875 et remplacées par deux  éphémères marchés aux chevaux et aux fourrages, de part et d’autre de la place du Danube, tandis que la zone située entre les rues David-d’Angers et de la Solidarité devenait vers 1904 un ensemble de jardins ouvriers. 


Les Folies de Belleville (Angle rue de Belleville et Rue Jules Romains, 19e)

Sous la Restauration, la haute Courtille, c’est-à-dire le début de la rue de Belleville jusqu’à la rue Rébeval, remplace la basse Courtille de la rue du Faubourg-du-Temple dans la faveur des Parisiens. C’est ici que les bourgeois viennent s’encanailler en compagnie des chiffonniers et des voyous des barrières. UN dandy anglais, Charles de la Battut, « Mylord l’Arsouille », est le héros de ces fêtes dont l’apogée se situe à l’aube du mercredi des Cendres avec la descente de la Courtille de Belleville à la place du Château-d’Eau (de la République). La dernière eut lieu en 1838, mais la vogue des bals de Belleville se prolongea jusqu’à la guerre de 1870. Les bals les plus célèbres se tenaient chez Desnoyez au 8 et chez Favié au 13, aux Folies de Belleville.


Manufacture de pianos Erard (110 Avenue de Flandre, 19e)

En 1780, les frères Sébastien et Jean-Baptiste Erard, venus de Strasbourg, fondent une manufacture de pianos à Paris. Après un bref séjour dans l’hôtel de Villeroi (rue de Varenne), puis rue de Bourbon (rue de Lille), ils s’installent rue du Mail et deviennent la principale entreprise française de pianos, avec une trentaine d’ouvriers vers 1800. Ils en emploient 150 en 1827, plus de 300 en 1847, 315 en 1872 lorsqu’ils transfèrent leurs ateliers de fabrication au 110-112 de l’avenue de Flandre, dans des bâtiments spécialement construits à cet usage, à proximité des chantiers et réserves de bois de La Villette. Cette usine n’a fermé ses portes qu’au début de la guerre de 1939. La maison Erard a considérablement amélioré le piano et mis au point la harpe moderne. 

Marché aux bestiaux de la Villette (213 Avenue Jean Jaurès, 19e)

En 1855, le baron Haussmann décide le remplacement des marchés de Poissy, de Sceaux et de la rue Cochin (Halle aux veaux) par un unique marché aux bestiaux. Situé à l’est de l’intersection des canaux Saint-Denis et de l’Ourcq, son terrain couvre une cinquantaine d’hectares, au sud des abattoirs dont le sépare le canal de l’Ourcq, enjambé par un pont. Un chemin de fer à cinq voies se raccorde à la ligne de ceinture pour assurer le débarquement du bétail et l’embarquement des viandes. En 1862, la fontaine aux lions construite par Simon Richard en 1811 pour la place du Château-d’Eau (actuelle place de la République) prend place dans la cour d’entrée. Et quatre grandes halles métalliques conçues par Baltard sont inaugurées le 20 octobre 1867. 


Parc des Buttes-Chaumont (angle Rue Botzaris Avenue Simon Bolivar, 19e)

Désireux de donner aux Parisiens de vastes espaces verts, Napoléon III décide d’adjoindre aux bois de Boulogne (ouest) et de Vincennes (est), les parcs Montsouris (sud) et des Buttes Chaumont (nord). Les travaux commencent en novembre 1863 sous la direction de l’ingénieur Alphand et du jardinier Barillet-Deschamps, sur une zone de 27 hectares dévastée par les carrières d’extraction de gypse, tandis que l’architecte Davioud édifie maisons de gardiens et chalets-restaurants. L’inauguration du parc, le 1er avril 1867, coïncide avec cette de l’Exposition universelle. Plus que toute autre réalisation monumentale du Second Empire, les Buttes Chaumont incarnent l’âme baroque de cette époque si bien exprimée dans la musique d’Offenbach. 

Regard de la Lanterne (7 Rue Augustin Thierry, 19e)

C’est sans doute au XIIe siècle que les eaux de Belleville ont été captées à l’usage du prieuré de Saint-Martin-des-Champs. Un aqueduc de grandes dimensions (1,92 mètres de hauteur sur 1,18 de largeur) collectait les eaux de nombreuses sources et les acheminait vers Paris. La canalisation était entretenue grâce à des regards dont trois subsistent : ceux de la Lanterne, des Messiers (17, rue des Cascades), de la Roquette (36-38, rue de la Mare). La tête de l’aqueduc se situait au regard de la Lanterne, édifice important (4,70 mètres de diamètre et 8,80 de hauteur) à demi-enterré, construit entre 1583 et 1613. On y accède par un escalier de 20 marches à double rampe.


Rotonde de La Villette (Place de la Bataille de Stalingrad, 19e)

En 1785, pour empêcher la contrebande et mieux percevoir les droits d’entrée des marchandises dans Paris, les Fermiers généraux font édifier un mur entourant la capitale. Des pavillons sont prévus aux barrières pour les bureaux des commis de l’octroi. Pour avoir conçu et commencé de construire des bâtiments d’un coût excessif, Ledoux est déchargé de sa tâche dès septembre 1787. La rotonde de La Villette, dite aussi barrière Saint-Martin ou barrière de Senlis, transformée en caserne de gendarmerie sous la Restauration, a subsisté, sans les quatre guérites qui commandaient la Grande Rue de La Villette (avenue de Flandre) et la route de Meaux (avenue Jean-Jaurès) convergeant vers la rue du Faubourg Saint-Martin. 


Rue Monjol (angle Rue Burnouf et Rue Monjol, 19e)

Assainie en 1926, la rue Monjol était la dernière Cour des Miracles de Paris. En voici une description en 1883 : « Sur les hauteurs, à l’angle de la rue Monjol, qui indique la nouvelle largeur de cette dernière rue, une des plus misérables de l’ancienne banlieue. Cette maison appartient à M.Smith, qui tient un débit de vins et liqueurs rue des Chaufourniers, à deux pas de là. Cela fait, tout compté, un total de trois maisons pour la rue Fréry… Il y a là des tableaux inimaginables. La rencontre de la rue Monjol avec la rue Asselin forme un rond-point de quelques mètres, où des enfants en guenilles vont se chauffer au soleil, quand il y a un rayon de soleil. Tout autour, des masures indescriptibles. Un couloir d’un mètre de largeur conduit à la rue Bolivar. D’un côté de ce couloir, une palissade en bois, de l’autre un tertre en contre-haut sur lequel on voit deux ou trois indescriptibles cabanes, des cabanes habitées comme il n’en existe nulle part dans Paris, ni à la cité Doré, ni au passage Papier. Tour cela navre le cœur » (Extrait d’un article paru dans « La Ville de Paris », 4 avril 1883).


Salle de la Marseillaise (61 Avenue de Flandre, 19e)

A l’élection législative partielle de novembre 1869, les XVIIIe et XIXe arrondissements de Paris élisent député le plus fougueux des ennemis de Napoléon III, Henri Rochefort. Après la fermeture de la salle des Folies-Denoyez, rue de Belleville, lieu de réunion des adversaires de l’Empire, Rochefort loue les combles de la brasserie du 51 de la rue de Flandre. Il les baptise Salle de la Marseillaise, du nom du journal qu’il vient de créer. L’inauguration a lieu le 28 décembre 1869 dans une salle comble, en présence de 3 000 personnes. Mais Rochefort ne tarde pas à être condamné à six mois de prison pour ses écrits dans « la Marseillaise », et la police, venue l’arrêter à l’entrée de la salle, déclenche le 7 novembre 1870 une émeute qui fait 150 morts et blessés.