jeudi 5 mai 2016

Seizième arrondissement



SEIZIEME ARRONDISSEMENT


Ancien domaine des Génovéfains (1 Rue Chardon Lagache, 16e)

Pendant 700 ans, les abbés de Sainte-Geneviève, dit Génovéfains, ont été les seigneurs d’Auteuil, de 1110 à la Révolution. Chaque mercredi, quelques novices quittaient la montagne Sainte-Geneviève pour une promenade à Auteuil, où ils appréciaient le petit vin du cru. L’abbaye y possédait un immense domaine, en partie couvert de vignes, qui descendait depuis l’église jusqu’à la Seine ; le château seigneurial longeait la rue Wilhem. Après la Révolution, il est acquis par le peintre François Gérard et, en 1858, par la ville de Paris. La maison de retraite Sainte-Périne, chassée de Chaillot par l’ouverture de l’avenue Joséphine (Marceau), y est reconstruite pierre par pierre. Elle s’y trouve toujours.


Atelier d’Henri Bouchard (1875-1960) (25 Rue de l’Yvette, 16e)

L’auteur du grand Apollon de la terrasse du Palais de Chaillot abandonne en 1920 le quartier de Montparnasse pour acquérir dans le village de Passy une maison dotée d’un jardin où construire un atelier. Agé de 45 ans, l’artiste est déjà célèbre pour avoir réalisé, avec Landowski, le grand « Monument de la Réforme » à Genève. Les pièces du rez-de-chaussée de la maison contiennent encore les meubles dessinés par Henri Rapin et sculpté par Bouchard lors de son installation. L’atelier est resté en l’état, et conserve toujours certains plâtres originaux, les outils de travail, des exemples des techniques de modelage, de moulage ou de fonte, qui exposent un peu de la genèse d’un œuvre. 


Avenue Foch (Angle Avenue Foch et Avenue Bugeaud, 16e)

La place de l’Etoile, de l’avenue Marceau à l’avenue de la Grande Armée, appartient au XVIe arrondissement. Commencé par le marquis de Marigny sous Louis XV, son aménagement se termine en 1854 par la construction des douze hôtels dits des Maréchaux. Haussmann décide de la relier au Bois par une artère magnifique, l’avenue de l’Impératrice. Les grands noms de l’aristocratie et de la finance y ont leurs hôtels, aujourd’hui détruits, y compris le célèbre « Palais rose » construit par Sanson, pour le Comte Boni de Castellane. Devenue avenir du Bois en 1875, Foch depuis 1922, elle reste une artère prestigieuse, avec ses 1200 m de long, 120 m de large, et ses jardins aménagés sur les bas-côtés.


Bergson (47 Boulevard Beauséjour, 16e)

Henri Bergson est né à Paris le 18 octobre 1859, d’un père de nationalité polonaise et professeur de musique à Londres. En 1880, Fustel de Coulanges doit intervenir auprès du ministre pour le faire accepter comme élève à part entière à l’Ecole normale supérieure : « L’élève Bergson qui au concours de 1878 a été classé le 3e n’a pas pu être admis régulièrement comme  élève de l’Ecole parce qu’il était fils d’étranger. Il n’a été reçu qu’à titre provisoire, hors-cadre, et à condition de payer la pension. Il vient d’atteindre sa majorité, et son premier acte a été d’opter pour la nationalité française ». Une grande carrière s’ouvre alors devant l’apprenti-philosophe : agrégé en 1881, docteur en 1889 avec une thèse « Sur les données immédiates de la conscience », il est professeur de lycée jusqu’en 1897, maître de conférence à l’Ecole entre 1898 et 1900, et enfin élu au Collège de France, d’abord à la chaire de philosophie grecque et latine, puis en 1904 à celle de philosophie moderne, qu’il occupe jusqu’à sa mort en 1941.


Château de la Tuilerie (angle Avenue du Général Dubail et Rue de l’Assomption, 16e)

La Tuilerie était un domaine important d’Auteuil, séparé de Passy par la rue des Tombereaux (Assomption). Son nom lui vient d’une fabrique de tuiles où l’on utilisait l’argile apportée par tombereau. Le château, reconstruit à la veille de la Révolution, était entouré d’un magnifique parc, surnommé « l’Invisible » par Napoléon ; il aimait y rendre visite à son amie, mme de Brienne. Les désaccords de Thiers, locataire du château en 1840, avec Louis-Philippe, suscitaient l’ironie : « la Tuilerie dit oui, les Tuileries disent non ». Acheté en 1855 par les dames de l’assomption, le domaine est loti à partir de 1928.


Château Seigneurial de Passy (82 Rue Raynouard, 16e)

La château seigneurial de Passy s’élevait au voisinage des rues des Vignes, Boislevant et Assomption. Grâce à Claude Chahu, qui construisit de ses deniers l’église N.D. de Grâces en 1661, à la demande générale, Passy devint indépendant d’Auteuil. Le château est embelli en 1720 par le banquier S. Bernard, pour sa maîtresse Mme de Fontaines, devenue « seigneur » de Passy. Des serres en cristal ornent les jardins qui descendent jusqu’à la Seine. Le Marquis de Boulainvilliers loue ensuite le château au fermier général de la Pouplinière, qui le transforme en Temple des Arts et de la Musique : J.B. Rousseau et Rameau sont des habitués. Le duc de Penthièvre est le dernier locataire du domaine, morcelé à partir de 1827.


Dernière demeure de Victor Hugo (124 Avenue Victor Hugo, 16e)

En juin 1878, une congestion cérébrale a raison des facultés créatrices du patriarche au fait de sa gloire littéraire et politique. Après des vacances à Guernesey, il s’installe avec Juliette Drouet dans un petit hôtel particulier, loué à la princesse de Lusignan. Le 26 février 1881, l’entrée du poète dans sa 80ème année est célébrée comme une fête nationale, avec arc de triomphe et défilé de six cent mille admirateurs ; peu après, l’avenue d’Eylau est rebaptisée de son vivant, insigne honneur, et ses amis peuvent désormais lui écrire : « à monsieur Victor Hugo, en son avenue ». Il meurt le 22 mai 1885, victime d’une congestion pulmonaire ; à l’heure de l’agonie, un ouragan de tonnerre et de grêle se déchaîne sur Paris. Ses dernières paroles ont été : « Je vois de la lumière noire ». En signe de deuil national, le Sénat et la Chambre lèvent leur séance. La nuit du 31 mai, son corps est exposé sous l’Arc de Triomphe et le 1er juin, deux millions de personnes l’escortent en cortège funèbre et triomphal jusqu’au Panthéon, rendu, en son honneur, à sa destination de sépulture des grands hommes.


Hôtel de Valentinois (angle Rue Raynouard et Rue Singer, 16e)

Sous l’Ancien Régime, cet hôtel possédait l’une des plus belles vues de Passy depuis qu’en 1711 sa propriétaire avait acheté l’immeuble d’en face pour l’abattre et y interdire toute construction. Il est le théâtre, de 1736 à 1774, des fêtes galantes données par la comtesse de Valentinois, belle-fille du prince de Monaco : intime de Mme du Barry, elle y convie ses amis libertins car « à Passy on s’amuse ». De 1777 à 1785, Franklin, envoyé solliciter l’aide de la France lors de la guerre d’Indépendance des Etats-Unis, y est l’hôte de son ami Le Ray de Chaumont. Aujourd’hui, le collège St-Jean de Passy occupe une partie du domaine. 


Hôtel de Verrières (45-47 Rue d’Auteuil, 16e)

Cet hôtel est construit vers 1715 pour la célèbre cantatrice Mlle Antier, et devient le premier salon d’Auteuil, fréquenté par la Cour et la Ville. Il est ensuite offert aux demoiselles de Verrières, chanteuses d’opéra, par un de leurs protecteurs, le marquis d’Epinay : elles s’y installent somptueusement, et y reçoivent Voltaire, Marmontel, le Maréchal de Saxe. De ce dernier, Marie a une fille en 1748, Marie-Aurore, qui épouse en 1777 un fermier général, Dupin de Francueil ; leur fils, Maurice, sera le père de George Sand, de son vrai nom Aurore Dupin. En 1862, l’ouverture de la rue Michel-Ange mutile le parc ; aujourd’hui, seule subsiste la façade côté jardin.


Hôtel Véron (14 Rue d’Auteuil, 16e)

Sur l’emplacement de la propriété de J. de Puscher, Véron, marchand rue Saint-Honoré, fait construire cet hôtel néoclassique à la fin du XVIIIe siècle. Sur l’attique de la façade, côté jardin, se lisent encore les initiales entrelacées de son propriétaire à partir de 1777 : Antoine Chardon. Sous l’Empire,le baron Pérignon y tient un salon fréquenté par les nouveaux riches. Sa protégée, orpheline, Caroline Archenbaut-Dufays, s’éprend à 26 ans de l’ancien précepteur des Choiseul-Praslin : en 1821 naît Charles Baudelaire. Les bienfaiteurs d’Auteuil, Chardon et Lagache, fondateurs de la maison de retraite, habitent l’hôtel à partir de 1856 ; ils agrandissent le jardin, défiguré dès 1895 par le percement de la rue Leconte-de-Lisle.


Joseph Kessel (1898-1979) (15 Boulevard Lannes, 16e)

Fils d’émigrés russes d’origine juive, Joseph Kessel, dont le père avait fuit les pogroms pour venir étudier la médecine en France, naît le 30 janvier 1898 à Clara (Argentine) et passe sa jeunesse entre Paris et la Russie : toute sa vie, il revendique ses origines cosmopolites et ne cesse de parcourir le monde. Par la guerre, d’abord : il s’engage en 1916 dans l’aviation et se porte ensuite volontaire pour la Sibérie en 1918 : arrivé à Vladivostok après la signature de l’armistice, il est retenu comme chef de gare sous prétexte qu’il est le seul à parler russe ! Il rentre en France par la Chine et l’Inde : le journalisme est devenu son métier, Kessel habite ici en 1931 lorsqu’il part réaliser une série de reportages sur la situation de l’Allemagne, et décrit Hitler « quelconque, triste et assez vulgaire ». Après la débâcle, il rejoint les Forces françaises libres à Londres, où il rédige avec son neveu Maurice Druon les paroles du Chant des Partisans. Le succès du Lion lui vaut d’entrer à l’Académie française en 1962 ; son œuvre de journaliste, « Joseph Kessel, témoin parmi les hommes » est publiée en 1969.  

C’est l’une des bornes les moins lisibles ; par manque d’entretien, une fine mousse végétale recouvre peu à peu la surface de la borne, compliquant le déchiffrement du texte.


La fondation Le Corbusier (55 Rue du Docteur Blanche, 16e)

D’origine suisse, Charles-Edouard Jeanneret, dit Le Corbusier (1887-1965), devient très jeune, par ses œuvres et ses écrits, une figure de proue du style international. En 1923 il déclare : « L’architecture est le jeu savant, correct et magnifique des volumes assemblés sous la lumière », et lance en 1925 la célèbre formule : « Une maison est une machine à habiter ! » sa théorie du Modulor repose sur le nombre d’or : « Trouver une gamme harmonique à l’échelle des dimensions humaines, et qui soit universellement applicable à l’architecture, au mobilier, à la mécanique, cette idée m’avait préoccupé depuis longtemps ». Après sa mort, Malraux salue en ces termes la dépouille exposée dans la Cour carrée du Louvre : « Il avait été peintre, sculpteur, et plus secrètement poète. Il ne s’était battu ni pour la peinture, ni pour la sculpture, ni pour la poésie : il ne s’est battu que pour l’architecture. Elle seule rejoignait son espoir confus et passionné de ce qui peut être fait pour l’homme ».


La maison de Balzac (47 Rue Raynouard, 16e)

Poursuivi par ses créanciers et menacé de saisie de sa propriété des Jardies de Sèvres, Balzac loua dans cette maison, le 1er octobre 1840, un appartement de 5 pièces en rez-de-jardin. Caché sous le pseudonyme de « M. de Breugnol », il y séjourna 7 ans. Le musée occupe aujourd’hui les trois niveaux de la maison jusqu’à la rue Berton où une seconde entrée permettait au romancier de fuir les importuns. C’est ici qu’il corrigea l’ensemble de « La Comédie humaine » et écrivit « Une ténébreuse affaire », « La Rabouilleuse », « Splendeur et misères des courtisanes », « La Cousine Bette », « Le Cousin Pons »… « Travailler, c’est me lever tous les soirs à minuit, écrire jusqu’à huit heures, déjeuner en un quart d’heure, travailler jusqu’à cinq heures, dîner, me coucher, et recommencer le lendemain », écrit-il le 15 février 1845 à Madame Hanska.


La naissance du Métropolitain (89 Avenue de la Grande Armée, 16e)

Devant la progression constante des embouteillages dans la capitale, une ingénieur conçoit vers 1845 un premier projet de chemin de fer urbain, dit « métropolitain » en 1873 et communément abrégé en « métro » dès 1891. Mais les conseillers municipaux veulent un réseau autonome contre l’avis des compagnies de chemin de fer, soutenues par le gouvernement, qui préconisent d’y ajouter la desserte des banlieues, et les partisans des viaducs s’opposent à ceux des souterrains. L’imminence de l’Exposition universelle de 1900 oblige à trancher. La Ville l’emporte, la déclaration d’utilité publique est votée le 30 mars 1898, et les travaux commencent sous la direction de Fulgence Bienvenüe (1852-1936). Cet ingénieur en chef des services municipaux depuis 1891 avait enseigné les mathématiques à Charles de Foucauld. Son projet comporte 6 lignes sur 65 km ; la priorité est donnée à la ligne n°1, ouverte le 19 juillet 1900. Elle relie la porte de Vincennes à la porte Maillot, dessert le Grand Palais et l’Exposition et connaît aussitôt le succès, avec 16 millions de voyageurs en 6 mois !


La Place du Trocadéro (17 Place du Trocadéro et du 11 Novembre, 16e)

Il y a 200 ans, la colline de Chaillot n’était qu’un désert escarpé, hérissé de rochers, et percé de carrières. Napoléon, frappé par la beauté du site, décide d’y bâtir un palais pour son fils, « un kremlin cent fois plus beau que celui de Moscou ». Les plans sont commandés dès 1810 à Percier et Fontaine, qui dessinent un projet grandiose, embrassant un coteau sur 400 mètres. On nivelle, on exproprie, on jette en 1813 le pont d’Iéna sur la Seine. La chute de l‘Empire entraîne l’arrêt des travaux. Un nouveau projet naît sous la Restauration, pour célébrer la prise d’une redoute en Espagne par le duc d’Angoulême ; il n’en reste que le nom « Trocadéro. A l’occasion de l’exposition de 1878, Davioud construit le premier palais du Trocadéro très controversé, une rotonde entourée de quatre tours romano-mauresques. Sa destruction est décidée lors de l’Exposition de 1937. Il est remplacé par l’actuel palais de Chaillot, œuvre de Carlu, Boileau et Azéma, parfaitement adaptée au site. La sobriété des façades est rehaussée par les sentences de Paul Valéry  gravées en lettres d’or. 


La pompe à feu des Frères Périer (4 Avenue de New-York, 16e)

En 1777, la révolte gronde chez les habitants de Chaillot : ils craignent d’être empoisonnés par la fumée. D’habiles mécaniciens, les frères Périer, viennent en effet d’obtenir l’autorisation d’installer une pompe à feu sur le bord de la Seine. Le projet vise à alimenter en eau courante les nouveaux quartiers de l’ouest parisien, comme à Londres où l’eau de la Tamise circule dans toute la ville. Dès 1781, l’usine fonctionne : deux pompes, Augustine et Constantine, prénoms féminisés des deux frères, mues par la vapeur, aspirent l’eau du milieu de la Seine et la refoulent dans 4 réservoirs, 37 mètres plus haut, place des Etats-Unis. Un gros tuyau, par le Fbg Saint-Honoré, conduit l’eau jusqu’à la Bastille. Ce système reste en vigueur jusqu’en 1902.


L’atelier de Carpeaux (39 Boulevard Exelmans, 16e)

Issu d’un milieu modeste, Jean-Baptiste Carpeaux, né à Valenciennes en 1827, est grand prix de Rome en 1854. A son retour, introduit par la princesse Mathilde auprès de Napoléon III, il obtient de nombreuses commandes officielles, et participe à la décoration des grands chantiers du Second Empire : le groupe de « La Danse » destiné à la façade de l’Opéra, le « Triomphe de Flore » pour l’architecte du Louvre, Lefuel, et les « Quatre parties du monde » pour la fontaine de l’Observatoire. En réaction contre l’idéalisme néoclassique, Carpeaux scandalise ses contemporains par l’affirmation de valeurs nouvelles axées sur la traduction du mouvement, l’observation du vivant et l’expression du pathétique de la condition humaine. Après sa mort (1875), ses héritiers font remanier son atelier à trois reprises : par Lewicki en 1888, Hector Guimard en 1895 (ajout du deuxième étage, très sobre avec deux statuettes en façade), et Harant en 1914.


Le Castel Béranger (14 Rue Jean de la Fontaine, 16e)

Né à Lyon le 10 mars 1867, Hector Guimard entre en 1882 à l’Ecole des Arts décoratifs de Paris, dans l’atelier de Charles Genuys, puis à l’Ecole des Beaux-Arts en 1885. Destin à l’Exposition universelle de 1889, le pavillon de l’Electricité préfigure déjà son goût pour le néo-gothique et l’emploi des matériaux modernes, très influencé par les « Entretiens sur l’Art » de Viollet-le-Duc. Entre 1894 et 1895, deux étés de voyages en Angleterre, en Hollande et en Belgique, où il fréquente Paul Hankar et Victor Horta, achèvent sa formation intellectuelle. Dès la réalisation de ce Castel aussitôt surnommé « Dérangé », édifié entre 1895 et 1898, son architecte de vingt-sept ans fait figure de grand-maître de l’Art nouveau. Manifeste artistique, cet immeuble d’habitations à loyers modérés, dont Guimard lui-même occupe le rez-de-chaussée à partir de 1897, est primé au premier concours de façades de la Ville, et célébré avec enthousiasme par ses premiers locataires, dont le peintre Paul Signac. 


Le grenier des Goncourt (67 Boulevard de Montmorency, 16e)

Amateurs d’art désireux de faire partager à leurs contemporains leur passion du XVIIIe siècle et de l’Extrême-Orient, les Goncourt s’installent ici en 1868, afin de disposer de plus de place pour leurs collections. Dans leur « grenier » du second étage, ils reçoivent tous les dimanche après-midi un grand nombre d’écrivains et d’artistes. Mais Jules, le plus jeune, né à Paris le 17 décembre 1830, disparaît prématurément, le 20 juin 1870 : « veuf » de son frère, Edmond (1822-1896) achève ici leur œuvre commune, le « Journal ». Dans le même souci de léguer leur nom à la postérité, il ébauche dès 1874le testament qui prévoit de décerner chaque année en décembre le « prix des Goncourt » à une œuvre en prose, « novatrice et hardie ».


Le hameau de Boileau (38 Rue Boileau, 16e)

Boileau a vécu presque 25 ans à Auteuil. En 1685 il achète au 26 rue des Garennes, qui désormais porte son nom, une maisonnette à un étage, tapissée de vigne, dont le jardin atteint l’entrée de l’actuel Hameau. Le poète a consacré une ode à son jardinier ‘Antoine, gouverneur de mon jardin d’Auteuil… » Il reçoit beaucoup, en particulier son ami Racine qui écrivait : « il est heureux comme un roi dans sa solitude ou plutôt dans son hôtellerie d’Auteuil ». Après la mort de Racine il vient moins souvent à Auteuil, et vend a maison en 1709. Devenue la propriété de Gendron, l’ami de Voltaire, la maison est désormais fréquentée par le philosophe.  


Le monument à Alphand (face au 22 Avenue Foch, angle rue Chalgrin, 16e)

Lors de l’inauguration, en 1899, le directeur des Beaux-Arts prononce l’éloge d’Alphand, qui a su transformer « le Paris des rois en Paris de la démocratie française ». Né en 1817, Jean-Charles Adolphe Alphand entre en 1835 à Polytechnique, en 1837 à l’Ecole des Ponts et chaussées. Appelé par Haussmann dès 1853 au poste d’ingénieur en chef des services de Promenades, il crée les espaces verts destinés à embellir et assainir la capitale, tels le parc Montsouris ou les Buttes-Chaumont, et remodèle les bois de Vincennes et Boulogne. Sa carrière ne souffre pas de la chute de l’Empire : en 1871, directeur des Travaux de Paris, il réunit sous son autorité les services de la Voie publique, des Promenades et plantations, de l’Architecture et du Plan, auxquels s’ajoutent les Eaux et égouts en 1878. Elu à l’Académie des beaux arts, il meurt en 1891. Cette commande, confiée au sculpteur Jules Dalou (1838-1902), traduit un peu de son rêve d’un colossal monument au Travail. A la place des allégories traditionnelles, Alphand est entouré de ses conseillers, l’architecte Bouvard, le peintre Roll, l’ingénieur Huet et Dalou lui-même, devant un bas-relief d’industrieux ouvriers.


Le musée Clemenceau (8 Rue Benjamin Franklin, 16e)

Georges Clemenceau est né le 28 octobre 1841, dans une famille républicaine de Vendée. Après des études de médecine à Nantes, il ouvre un dispensaire à Montmartre, mais se consacre à la politique au lendemain de la chute de l’Empire, après son élection à la mairie du XVIIIe arrondissement. Attiré par le jardin et la vie paisible du quartier, le Tigre, qui ne laissait à personne le soin de tailler ses rosiers, s’installe ici en 1895, pour y demeurer jusqu’à sa mort, le 24 novembre 1929. Son bureau ouvre largement sur le jardin par une baie vitrée, et la grande table de travail, toujours chargée de livres et de papiers, porte encore le manuscrit inachevé de « Grandeur et misère d’une victoire ». 


Le puits artésien de Passy (Angle Avenue Henri Martin et Square Lamartine, 16e)

En 1855, on voit s’élever à l’intersection des avenues Henri Martin et Victor Hugo un derrick flanqué d’une longue cheminée, qui attire des milliers de visiteurs curieux vers ce quartier encore peu habité. C’est de l’eau que l’on cherche ! Les besoins de la Ville augmentent en effet considérablement, depuis que les travaux d’aménagement du Bois de Boulogne ont commencé. Un ingénieur saxon, Kind, s’est engagé à forer un puits artésien qui donnerait plus d’eau que celui de Grenelle. Il faut creuser jusqu’à 587 mètres pour voir enfin jaillir l’eau, 6 ans plus tard, avec un débit de 25 000 m3 par jour. Aujourd’hui, il n’est plus que de 350 m3.


Le Ranelagh (face au 38 Avenue Raphaël, 16e)

En  1774, le gouverneur de la Muette donne à un certain Morison l’autorisation d’enclore une partie de la pelouse de Passy, pour y installer un café et un bal, à l’imitation de celui que Lord Ranelagh avait créé à Chelsea près de Londres. Pour satisfaire à l’anglomanie ambiante, l’établissement est appelé « le petit Ranelagh ». Lors de ses séjours à la Muette, Marie-Antoinette vient y danser : elle en assure le succès. Les Muscadins sous le Directoire, la duchesse de Berry sous la Restauration, remettent l’endroit à la mode. Il disparaît en 1859 lors du réaménagement du quartier. D’une pelouse voisine, le 21 novembre 1783, Pilâtre du Rozier s’élève pour la première fois dans les airs, en montgolfière.


Les Delessert à Passy (19 Rue Raynouard, 16e)

Pendant plus d’un siècle a vécu sur les coteaux de Passy la famille Delessert, dynastie protestante enrichie dans le commerce de la soie et la banque à Lyon, puis dès 1777 à Paris, où elle finit par posséder, par acquisitions successives, tous les terrains compris entre les rues Le Nôtre et Ankara. L’entrée principale de la propriété est au 19-21 de la rue Raynouard. En 1812, Benjamin Delessert crée une raffinerie à la hauteur du n°14 quai de Passy ; il est le premier à produire du sucre de betterave. En 1824, il fait construite un pont suspendu pour le relier au domaine familial. Celui-ci sera loti par ses héritiers à la fin du second Empire.


Les derniers jours de Baudelaire (1 Rue du Dôme, 16e)

Hémiplégique et aphasique à la suite de l’attaque cérébrale dont il a été victime trois mois auparavant en Belgique, Charles Baudelaire est ramené à Paris en juillet 1866 et entre ici à la maison de santé du docteur Duval. Il avait quitté deux ans plus tôt la France qu’il désirait « oublier pendant quelque temps », lassé des tracasseries et du désaveu de ses contemporains, malgré la soutien de Victor Hugo : « Vous allez en avant. Vous dotez le ciel de l’art d’on ne sait quel rayon macabre. Vous créez un frisson nouveau (…) Et quant aux persécutions, ce sont des grandeurs. Courage ». La publication des Fleurs du Mal lui avait en effet valu d’être condamné, pour délit d’outrage à la morale publique, à la suppression de six poèmes et au paiement d’une forte amende. Sa dernière année se passe ici, au rez-de-chaussée du pavillon situé au fond du jardin, dans un chambre bien éclairée et ornée de deux toiles de Manet. Le 31 août 1867, à l’âge de 46 ans, Charles Baudelaire s’éteint sans souffrance apparente, sa mère à son chevet.  


Les salons d’Auteuil (57 Rue d’Auteuil, 16e)

Au 59 de la rue d’Auteuil, dans une maison entourée d’un beau jardin, achetée en 1772 au pastelliste Quentin de la Tour, Mme Helvétius, veuve du philosophe, tient jusqu’à sa mort en 1800 un salon célèbre où aiment à se retrouver les grands esprits du siècle des lumières : Malesherbes, Turgot, d’Alembert, Condorcet. Celle que son ami Benjamin Franklin appelle « Notre Dame d’Auteuil » échappe à la guillotine grâce à son immense générosité. Elle décline sa demande en mariage - elle a 65 ans et lui 80 – mais lui écrit d’Amérique en 1785 : « toutes les fois que dans mes rêves je me transporte en France, c’est d’abord à Auteuil que je vais ». Elle voisine agréablement avec la spirituelle Madame de Boufflers, devenue en 1773, après une longue liaison avec le prince de Conti, propriétaire de l’immense domaine d’en face, où la rejoignent les habitués du fameux salon du Temple, séduits par le beau parc à l’anglaise, dont la « Villa Montmorency » est aujourd’hui le seul vestige.   


Marcel Proust (44 Rue de l’Amiral Hamelin, 16e)

Né rue La Fontaine le 10 juillet 1871, Marcel Proust, fils d’un médecin célèbre, mène d’abord une vie mondaine et décevante ; puis il voyage, rencontre le critique d’art Ruskin à Venise en 1900, traduit ses œuvres. Après la mort de ses parents, sa santé devient de plus en plus fragile, et il se cloître dans une chambre tapissée de liège pour étouffer les bruits. Dès lors, il se consacre à la rédaction de « A la Recherche du temps perdu », dont il se voit refuser la première partie en 1912 : Gide, lecteur chez un grand éditeur, n’aurait même pas pris la peine d’ouvrir le manuscrit, sur sa réputation de « snob, dilettante et mondain » ! Léon Daudet impose néanmoins au jury du prix Goncourt « A l’ombre des jeunes filles en fleurs », en 1919. Avant la pneumonie qui l’emporte le 18 novembre 1922, Proust réussit à achever son long poème de la mémoire. « On l’enterra,mais toute la nuit funèbre, aux vitrines éclairées, ses livres disposés trois par trois veillaient comme des anges aux ailes éployées et semblaient, pour celui qui n’était plus, le symbole de sa résurrection ».


Paul Valéry (1871-1845) (40 Rue Paul Valéry, 16e)

Depuis 1900, l’année de son mariage avec la nièce de Berthe Morisot, Paul Valéry occupe le 4e étage de cet immeuble. Elu en 1937 à la chaire de Poétique du Collège de France, il en donne sous l’occupation cette belle définition : « C’est une maison où la parole est libre ! » Le 25 mars 1945, trop affaibli, il annonce à ses auditeurs qu’ils viennent d’assister à sa dernière leçon : « Je vais me coucher, et l’on ne me verra plus » confie-t-il à un proche. Son attitude stoïque et lucide impressionne son médecin, qui témoigne : « Ce fatal matin du 20 juillet il y avait un fort orage sur Paris. Au moment même où Valéry rendait le dernier soupir, la fenêtre de la chambre s’ouvrit avec fracas, les rideaux tourbillonnèrent, et j’eus la bouleversante et immédiate sensation que cette âme puissante venait de s’envoler dans la tempête. » Informé du décès,le général de Gaulle ordonne des obsèques nationales, avec les honneurs militaires et une cérémonie officielle sur l’esplanade du Trocadéro. Pour la veillée funèbre, deux faisceaux de projecteurs dessinent un immense V de la tour Eiffel au Panthéon, seul éclairé dans une ville en deuil.


Porte Maillot  (Angle Rue Joseph et Marie Hackin et Rue André Maurois, 16e)

Seul vestige de l’immense forêt de Rouvray, qui s’étendait de Billancourt à St-Denis, le bois de Boulogne est rattaché à la couronne par Philippe Auguste : la passion des rois de France pour la chasse l’a préservé de la destruction. Charles IX y construit le pavillon de la Muette, François Ier, le château de Madrid, Henri II, une enceinte percée de 8 portes, dont la Porte Maillot, entrée principale du Bois. Louis XIV y fait aménager de longues avenues rectilignes pour faciliter le déroulement des chasses. Napoléon III sauve le Bois saccagé par les guerres et le cède en 1852 à la Ville de Paris. Le baron Haussmann et l’ingénieur Alphand sont les créateurs de l’actuel Bois de Boulogne, rattaché en 1929 avec ses 825 hectares au XVIe arrondissement, dont il double la superficie.

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